Les trois drapeaux russes et le retour de l’unité nationale

Trois drapeaux pour symboliser l’histoire de la Russie, qui n’a pas commencé en 1991, et pour constituer la Nation au-delà des révolutions. Pour la première fois depuis la chute de l’Union soviétique, le drapeau rouge est levé lors d’une cérémonie devant le Chef de l’Etat. La cérémonie a eu lieu à Saint-Pétersbourg, sur les rives du Golfe de Finlande. C’est également une grande victoire de l’armée russe.

Ce 17 juin, le Président Poutine a assisté à la cérémonie officielle de levée des drapeaux russes à Saint-Petersbourg : le tricolore, le drapeau soviétique et le drapeau impérial.

«Trois immenses bannières se sont envolées dans les airs : chacune représente un peu plus de la moitié du terrain de football — 60 mètres sur 40, elles pèsent près d’une demi-tonne. La levée de trois drapeaux d’un pays est prévue pour coïncider avec les dates d’établissement de chacun d’eux : 165 ans du drapeau de l’Empire russe, 100 ans du drapeau de l’URSS et 330 ans du drapeau tricolore de Pierre le Grand.»

L’histoire d’un pays est un tout, au-delà des révolutions et des changements idéologiques, des personnalités qui plaisent ou qui dérangent, des victoires et des défaites. Il est vrai que l’histoire de la Russie est particulièrement riche en rebondissements idéologiques, ce qui complique la construction d’un discours historique national unifié et unificateur, englobant toutes ces périodes. La Russie soviétique s’est construite au départ sur le rejet de l’Ancien Régime, pour ensuite l’intégrer, une fois son pouvoir installé et renforcé, cherchant elle aussi la légitimité dans la continuité. La Russie néolibérale s’est construite en 1991 contre l’URSS, aidée en cela par le monde occidental, qui a lui aussi besoin de voir démoniser son ennemi. La démonisation a survécu de longues années à la chute de l’Union soviétique, la peur était trop grande de le voir renaître de ses cendres (toujours chaudes) sur fond de crise sociale, de désindustrialisation, de dépendance économique et de distanciation des élites politiques de l’opinion populaire. 

Aujourd’hui, le temps s’est accéléré et dans le combat existentiel, qui se mène autour de la vision du monde, la Russie recolle les morceaux, en commençant avec les drapeaux. Démarche saine et salutaire, seule l’unité pouvant lui conférer l’énergie vitale, dont elle besoin pour remporter ce conflit. L’histoire d’un pays est le corps qui va porter la nation, consolider le peuple. Si l’on enlève un morceau par-ci par-là, parce qu’il ne plaît pas, si l’on rajoute un morceau de-ci de-là pour que cela fasse plus joli, l’on perd le corps pour ne se retrouver qu’avec un cadavre. Ou un monstre. Et l’Ukraine en est le parfait exemple. La France est en train de suivre la même voie, en se reniant.

«Le porte-parol du Président russe, Dmitri Peskov, a qualifié la levée du drapeau national de l’URSS sur l’un des trois mâts de symbole de continuité historique. « Il n’y a rien de plus là-bas et il ne doit rien y avoir. C’est précisément le symbole de la continuité de notre État russe », a déclaré le porte-parole. Peskov a noté que l’histoire de la Russie moderne ne se limite pas à l’histoire récente. «C’est l’histoire de l’Union soviétique, c’est l’histoire de l’Empire russe. Nous avons une histoire très ancienne et riche », a-t-il ajouté.»

La guerre globale, qui se déroule sous nos yeux, conduit la Russie à vouloir dépasser la fracture historique des Rouges et des Blancs, pour faire revenir au premier plan les Russes. 

Par Karine Bechet-Golovko