Blinken / Lavrov au G20 : quand les diplomates doivent s’excuser de faire de la diplomatie

Tout en refusant haut et fort de rencontrer son homologue russe, Blinken s’est approché pour une discussion dans les couloirs. Quoi de plus normal, entre diplomates, que de discuter ? C’est bien l’intérêt de ces grandes messes globales, que de permettre des rencontres informelles. Mais ce temps est révolu. Désormais, le porte-parole du Département d’Etat a dû refuser de s’excuser devant les journalistes de cette discussion. Donc, désormais, la question d’une excuse pour échange diplomatique avec la Russie se pose dans les pays de L’Axe. De quel processus de paix parliez-vous?

Les médias anglo-saxons sont tout en émoi : Blinken a rencontré Lavrov pour la première fois depuis février dernier. Que l’on prenne le Financial Times ou le NYT, nous avons droit à la même exclamation : c’est la première rencontre ! Suivie d’une interrogation : cela doit bien vouloir dire quelque chose …

Surtout qu’il est important de remettre cette rencontre, de 10 minutes, dans un couloir, dans son contexte. Blinken déclarait juste avant jamais, Ô grand jamais, ne rencontrer Lavrov dans les conditions actuelles, croix de bois, croix de fer … Pourtant, les autorités russes déclarent bien le contraire, Blinken cherchait le contact.

«Des responsables russes ont déclaré que M. Blinken avait cherché à rencontrer M. Lavrov, bien que M. Blinken ait déclaré aux journalistes un jour plus tôt, avant de prendre l’avion d’Ouzbékistan pour l’Inde, qu’il n’avait pas l’intention de rencontrer à la conférence M. Lavrov ou M. .Qin.»

Bref, si on  oublie un instant les hésitations politico-communicationnelles, sur le mode du je voudrais bien, mais je ne veux pas être le premier, une rencontre «par hasard» a donc bien été organisée au G20. 

«La rencontre imprévue avec Sergueï V. Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères, lors d’une conférence internationale à New Delhi, a montré que l’administration Biden voyait le besoin de rétablir des contacts diplomatiques en personne avec Moscou, afin que les deux gouvernements puissent discuter de la guerre, qui dure depuis un an, ainsi que des problèmes qui vont au-delà.»

Tout cela est en fait absolument normal. Blinken a traditionnellement demandé à Lavrov que Moscou arrête de défendre ces territoires russes, pardon «d’agresser l’Ukraine», que la Russie continue à prendre unilatéralement des obligations internationales quand les USA en sont sorties, oups qu’ils renoncent à la suspension du traité New Start, et que leur citoyen soit libéré, indépendamment de la législation russe. Bref, la routine.

Et cette brève rencontre, qui n’aura strictement aucun impact, a mis en émoi ce si petit monde. Bien que Maria Zakharova, pour la Russie, en ait à juste titre minimisé l’importance, le porte-parole du Département d’Etat, Ned Price, devant les journalistes, a déclaré que Moscou tentait d’en faire tout un plat.

En fait, Ned Price s’est trouvé confronté à une situation pour le moins caucasse, quand un journaliste lui a demandé pourquoi Blinken a discuté avec Lavrov de l’Ukraine, si la Maison Blanche déclare constamment que des pourparlers sur l’Ukraine avec la Russie ne peuvent se passer qu’avec l’Ukraine.

«Blinken a parlé uniquement des 10 points de la proposition du président [ukrainien Vladimir] Zelensky», a-t-il déclaré.

Les journalistes souhaitaient également savoir, si Blinken avait vraiment demandé une rencontre, et pourquoi il avait décidé d’avoir de tels contacts en ce moment, et si cela signifiait des changements dans la situation et les approches de Washington concernant les relations avec Moscou.»

Donc, le simple fait, que deux diplomates se rencontrent, soulève des questions … La réponse de Ned Price fut directe :

«Nos collègues russes essaient de faire tout un plat. Nous considérons qu’il est important de noter, qu’il ne s’agissait pas d’une réunion à part entière, mais d’un court contact. Nous ne nous excuserons pas d’avoir agi dans notre propre intérêt. a déclaré Ned Price lors du briefing.»

Ce n’est vraiment pas le temps de la diplomatie … Celle-ci est incompatible avec le fanatisme, elle demande de la finesse. Une finesse, qui n’est pas à l’ordre du jour.

Karine Bechet-Golovko

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