Famine : L’escroquerie céréalière ou comment l’Occident s’approprie les céréales ukrainiennes
vendredi 9 septembre 2022
L’accord céréalier du 22 juillet signé entre l’Ukraine, la Turquie, la Russie et l’ONU tourne à la farce. Non seulement, la quasi-totalité des navires est dirigée vers des pays occidentaux, mais la contre-partie prévoyant l’export de produits russes n’est pas remplie. La Russie pense de plus en plus sérieusement à ne pas le reconduire en novembre, puisqu’il n’a strictement aucun rapport avec «faim dans le monde» — à moins de ne considérer l’Occident comme étant ce monde.
Après de grandes déclarations médiatiques enjoignant la Russie à faire des concessions pour sauver le monde d’une famine politico-médiatique globale, celle-ci a donné son accord pour le fameux Accord céréalier (voir notre texte ici) en juillet de cette année. Dès lors, nous n’entendons plus parler de la famine dans le monde. Le miracle est arrivé !
Mais qu’en est-il réellement? Poutine a soulevé la question lors du Forum économique de Vladivostock et a déclaré que seulement 2 des 87 navires partis des ports de la mer Noire se sont dirigés vers des pays africains, les autres sont arrivés dans les pays européens :
«Le président russe a déclaré que seuls deux navires ont été chargés dans le cadre du programme mondial de l’ONU, qui aide les pays dans le besoin, ce qui correspond à 67 000 des 2 millions de tonnes de céréales en provenance d’Ukraine. «Ce n’est que 3%, qui sont envoyés dans les pays en développement. Ces nombreux pays européens, qui au cours des décennies et des siècles précédents ont agi comme des colonisateurs, continuent à agir ainsi aujourd’hui. Une fois de plus, ils ont simplement trompé les pays en développement et continueront de les tromper », est convaincu Vladimir Poutine.»
Et ces pays ne tiennent pas non plus leurs engagements envers la Russie, puisque l’accord prévoyait l’accès des céréales russes au marché mondial — s’il y a famine, tout blé est bon … Poutine a déclaré qu’il en parlerait avec Erdogan, l’autre partie de cet accord. Erdogan, qui en bon commerçant, a immédiatement déclaré que les céréales russes devaient rapidement arriver sur le marché, mais qu’il en parlerait avec Poutine et que ces céréales, Ô bien sûr, devaient partir vers les pays dans le besoin — peut-être que les pays européens sont entrés furtivement dans cette catégorie ?
Ainsi, le ministère des Affaires étrangères en la personne du représentant de la Russie à l’ONU, Nebenzia, n’exclue pas la possibilité de l’annulation de cet Accord, l’Occident ne remplissant pas ses obligations :
«Il a rappelé que l’accord a été conclu pour quatre mois et expire en novembre. Dans des circonstances normales, il devrait être prolongé. Cependant, étant donné le manque de résultats, Nebenzia a déclaré qu’il n’excluait rien. Le diplomate a souligné que la Fédération de Russie souhaite voir la mise en œuvre de la partie russe de l’accord, mais ce n’est pas encore le cas.»
Que chaque partie, lors d’un accord international, ait envie d’en tirer le maximum d’avantage est normal. Mais détourner aussi grossièrement le sens de l’Accord (devant formellement sauver le monde de la famine), puisque la quantité de céréales devant aller vers les pays dans le besoin n’a pas été fixée, et simplement ne pas remplir la contre-partie, à savoir l’ouverture du marché aux produits alimentaires russes, est au-delà de la norme. En temps de guerre, cela veut dire que ces parties à l’accord sont dans le camp adverse et qu’elles n’envisagent les accords internationaux, que comme un front supplémentaire. C’est une position risquée, sur le plan stratégique.