La fausse démission de Macron et la globalisation radicale en France
Après la dissolution de l’Assemblée nationale, les médias s’emballent sur une possible démission de Macron, et pourquoi pas son retour immédiat en héros du peuple revenu à ses moutons. Si ce scénario est politiquement peu probable et a déjà été démenti, il est de toute manière juridiquement inconstitutionnel de le voir immédiatement candidat à sa succession. Tout ceci ressemble beaucoup plus à une opération de comm, ayant pour but de faire sortir la vapeur dans la société et créant une fausse image de De Gaulle version Instagram.
La décision de dissolution de l’Assemblée nationale a surpris. Quel est le rapport entre un scrutin étranger, pour des représentants pas même de la France, dans une institution non-française, et les députés français ? En tout cas, si l’on est dans une logique étatiste, il n’y a aucun rapport. Mais dans la logique globaliste, le désaveu des partisans de la globalisation radicale, soutenue par Macron et ses émules en France, justifie en effet cet acte, puisque le niveau national dépend du supra-national.
Or, la roue continue à tourner et désormais l’on apprend que Macron pourrait même envisager de démissionner, en fonction du résultat des législatives anticipées. Dixit Europe 1, qui en profite pour démentir :
Selon les informations d’Europe 1, Emmanuel Macron a abordé ces dernières semaines avec l’un de ses interlocuteurs l’hypothèse d’une démission. Ce mardi matin, le palais de l’Élysée fait savoir qu’il dément ces propos rapportés.
Nous sommes donc bien dans une opération de communication. Pendant quelques heures, Macron a joué à De Gaulle. Tous les médias français se sont emballés sur ce point. De grandes réflexions ont même conduit à l’idée d’une super stratégie de Macron : comme il ne termine pas son deuxième mandat, ça n’en fera pas deux et c’est reparti pour un quinquennat. Le problème est qu’il ne peut pas se représenter, ce que tous les constitutionnalistes ont indiqué. Et de préciser :
Dominique Rousseau rappelle que l’objectif de la révision constitutionnelle de 2008 était de limiter le pouvoir du président à deux mandats consécutifs maximum. Démissionner puis se représenter parce que l’un des deux mandats n’a pas été effectué dans son entièreté serait «un détournement de l’objet même de l’article 6 de la Constitution», insiste-t-il.
D’ailleurs le démenti est rapidement tombé de l’Elysée. Le problème avec De Gaulle, c’est qu’il faut revenir à un système de responsabilité politique. Ce qui est aux antipodes du mode de fonctionnement de cette caste. L’apparence, oui, mais pas plus. Nous sommes bien dans la posture, la création d’une image, qui permet par ailleurs aux gens d’en parler et de faire ainsi retomber la pression. Le fantasme remplace la réalité, en tout cas doit la compenser.
Bref, Macron ne part pas, d’autant plus qu’il faudra de toute manière le remplacer bientôt. En revanche, l’on revient, institutionnellement, à un découplage de la durée des mandats présidentiel et parlementaire.
A court terme, se pose surtout la question de la composition de l’Assemblée et donc de la formation du Gouvernement. Dans notre système, le Gouvernement doit impérativement découler de la majorité parlementaire et le Président ne peut nommer qu’un Premier ministre représentant cette majorité.
Il y a de très fortes chances, vu les manipulations de l’opinion publique, la division volontaire de l’opposition et l’impopularité objective du RN, que Macron ne perde pas le contrôle de l’Assemblée, mais qu’il soit simplement affaibli. Même si sur le fond ces partis d’opposition parlementaire ne sont idéologiquement pas éloignés de Macron, et comme ils participent au même paradigme idéologique globaliste c’est logique, il est symbolique qu’un parti comme le RN, qui malgré son instrumentalisation dans le jeu politique dérange en tant que tel, puisse se renforcer. C’est symbolique et c’est un mauvais symbole pour ces élites dirigeantes. Car cela fait glisser la gouvernance en France du globalisme radical au globalisme soft. On doit baisser d’un cran.
Il faut bien comprendre qu’ici l’enjeu n’est pas ce parti, mais ses électeurs. Indépendamment de la soumission des élus RN sur les grandes questions, ils sont quand même moins fanatiques que la clique de Macron, et surtout leurs électeurs attendent réellement une politique souveraine. C’est cet électorat réellement souverainiste, qui existe et qui n’a pas réellement de représentants dans les partis parlementaires, qui fait peur à Macron.
Comme certains l’envisagent :
Car le pari au fond d’Emmanuel Macron, c’est l’électrochoc. En ce sens, un cadre du parti l’assume sans ciller : «La cohabitation avec le RN peut aussi être une piste pour les laisser se planter joyeusement avant 2027.»
Une cohabitation enverrait un signal politique d’échec des radicaux globalistes, actuellement au pouvoir. Sur le fond, l’on aurait droit à la même soupe italienne, mais sans les excès macroniens actuels. En menant une politique somme toute proche de celle conduite par Macron, sans compter les entraves à la gouvernance rappelant la présidence trumpiste aux Etats-Unis, le RN aura en effet toutes les chances de se planter en 2027 aux présidentielles. Ou pas. Mais l’accroc aura été réalité. Et nous sommes dans un jeu à long terme. Mais il y a de toute manière peu de chance pour que ce scénario se réalise. Car il serait le premier recul des globalistes radicaux en France et tout sera fait pour l’empêcher. Un système, qui commence à reculer, se rapproche de la chute.
Ce système, qui nous gouverne et pas uniquement en France, est devenu à ce point rigide et totalitaire, qu’il ne peut plus se permettre une gouvernance globaliste soft.
Par Karine Bechet-Golovko