Poutine annonce la mise en place d’une «zone démilitarisée» en Ukraine
L’intensification de l’attaque du territoire russe par l’armée atlantico-ukrainienne conduit la Russie à adapter sa stratégie militaire dans ce conflit, afin de garantir la sécurité de son territoire. Ainsi,Vladimir Poutine, s’exprimant devant ses représentants pour les élections présidentielles, est-il revenu sur la déclaration de cet été concernant l’établissement d’un «corridor sécuritaire», à savoir une zone démilitarisée sur le territoire ukrainien, tenant compte de la distance de tir des armes de l’OTAN.
La question de la sécurisation de son territoire étant au coeur de ce conflit pour la Russie, l’escalade de la puissance des armes fournies par les pays de l’OTAN dans le combat en Ukraine l’a conduite à adapter sa stratégie — et à l’affirmer ouvertement. Sans une zone démilitarisée, qui repousse l’armée atlantico-ukrainienne hors de portée de tir du territoire russe, les populations civiles russes ne seront pas en sécurité.
Cette idée d’une «zone sanitaire» avait été délicatement avancée par Poutine en juin dernier, quand il avait déclaré devant les correspondants de guerre :
«La possibilité de bombarder notre territoire depuis le territoire de l’Ukraine demeure, et il existe plusieurs façons de résoudre ce problème. Premièrement, en augmentant l’efficacité de la guerre de contre-batterie, mais cela ne signifie pas qu’il n’y aura pas de ces tirs sur notre territoire», a déclaré Poutine lors d’une réunion avec les correspondants de guerre.
«Et si cela continue, nous devons apparemment réfléchir — je le dis avec beaucoup de prudence — à la création d’une sorte de zone sanitaire sur le territoire de l’Ukraine, à une distance telle, qu’il serait impossible d’atteindre notre territoire.»
Manifestement, le moment est venu de la créer. C’est ce que le Président russe vient d’annoncer :
«Cette ligne (démilitarisée, ndlr) devrait être établie de telle manière et à une telle distance de notre territoire, qu’elle en garantirait la sécurité, j’entends des armes à longue portée, principalement de fabrication étrangère, que les autorités ukrainiennes utilisent pour bombarder des villes pacifiques.»
Si la décision de principe a été prise, au minimum se posent deux questions : tout d’abord, celle de la limite géographique de cette zone, puis celle du contrôle de cette zone.
Géographiquement, Medvedev a apporté une précision, technique, puisqu’elle découle de la capacité de tir des armes occidentales utilisées.
«Compte tenu des décisions de l’ennemi de fournir au régime de Kiev des armes de plus en plus longues portées, une telle ligne devrait longer les frontières de Lvov (Lemberg polonais), afin de jouer un véritable rôle défensif. Ce seraient alors les nouvelles frontières sûres, de ce qu’on appelait auparavant le « pays 404 ».»
Comment constituer cette zone ? Pour l’instant, si l’armée russe avance sur certaines parties du front, nous sommes pour le moins assez loin d’une poussée fulgurante. S’il s’agit des tirs, devant détruire les infrastructures et les stocks atlantistes sur le territoire ukrainien, ce qui se passe déjà depuis un certain temps, mais sans contrôle du territoire, la constitution de cette zone de sécurité sera plus médiatique et putative, que réelle. Les stocks et les infrastructures se rétablissent.
La constitution d’une réelle zone de sécurité implique un contrôle direct et physique du territoire. Notamment, donc, la reprise des territoires perdus, et sous l’influence de négociations politiques douteuses, et suite à certaines décisions militaro-politiques, qui ont largement ouvert le flanc des régions russes justement aujourd’hui touchées. D’une manière générale, certains experts estiment ainsi qu’il faut repousser l’armée ukraino-atlantiste jusqu’aux frontières de Galice, ce qui sera particulièrement difficile.
Une autre question, vitale pour la sécurité de la région, est soulevée par Dmitri Medvedev : est-il possible d’envisager l’existence d’une forme d’étaticité sur le territoire ukrainien, sans que cela ne soit un danger pour l’équilibre de la région ?
L’histoire a montré qu’à chaque fois qu’un Etat a été créé sur une partie du territoire ukrainien, il a été utilisé par l’Occident contre la Russie. Il est important de tirer les leçons de l’histoire. Et il faut, pour cela, s’en donner les moyens — notamment politiques.
Par Karine Bechet-Golovko