Ukraine : ces mercenaires français, que la France renie
Plus 60 combattants côté ukrainien tués et 20 blessés par une frappe de l’armée russe à Kharkov. Le ministère russe de la Défense affirme, qu’il s’agit principalement de Français. La question, qui se pose est assez simple : s’agit-il réellement de mercenaires, et alors ils sont en infraction à la législation pénale française et doivent être condamnés par la justice française, ou bien n’est-ce pas le début d’une intervention directe des forces armées françaises en Ukraine ? A ce jour, Paris fait l’autruche, ne pouvant assumer publiquement sa ligne politique.
Le 16 janvier, le ministère russe de la Défense a annoncé avoir effectué une frappe sur un site à Kharkov, où se trouvaient des mercenaires étrangers, pour l’essentiel des Français. Suite à cela, il y aurait eu plus de 60 morts et une vingtaine de blessés.
Les médias français reprennent en choeur le discours ukrainien : ce sont des civils, qui auraient été touchés. Certains affirment même qu’aucun Français n’aurait été tué, ce serait de la désinformation. TF1 estime que cette information est impossible à vérifier. Confortable. Le Quai d’Orsay nie formellement l’envoi par la France de mercenaires en Ukraine sur le mode, ce ne sont pas nos cadavres, débrouillez-vous avec. Les familles apprécieront.
«La France n’a pas de “mercenaires”, ni en Ukraine, ni ailleurs, contrairement à d’autres. Il s’agit d’une nouvelle manipulation grossière russe. Il ne faut pas lui donner plus d’importance qu’aux précédentes et qu’aux suivantes qui ne manqueront pas d’arriver», a ajouté le Quai d’Orsay.
Pourtant, les médias en parlent, de ces Français qui n’existent pas pour le pouvoir français, qui se battent et qui meurent aux côtés des atlantistes en Ukraine. En fait, les médias ne nient pas l’implication de Français dans le conflit en Ukraine, côté ukrainien. Mais comme chacun le sait, et notamment les familles des victimes, ils sont invincibles … Comme il semblerait que le ministère français des Affaires étrangères ne lise pas les journaux, donc voici dans Le Parisien au sujet de ces fantômes, qui dérangent :
Dès mercredi soir, Xavier Tytelman, ex-aviateur militaire en contact avec plusieurs combattants français sur place, assurait qu’aucun dommage n’était à déplorer et qu’il n’y avait pas de rassemblement particulier de nos concitoyens à Kharkiv. C’est « une intox grossière, aucun Français n’a été tué depuis des mois », abonde ce jeudi le colonel Michel Goya, ancien officier des troupes de marine.
Toujours est-il que l’ambassadeur français a été convoqué hier par le ministère russe des Affaires étrangères, afin d’expliquer ce que font autant de Français dans ce conflit en Ukraine. Et la question est délicate, car le mercenariat est pénalement condamné par la législation française.
Si la France, formellement, condamne la participation de Français à ce combat, des Français meurent régulièrement sur ce champ de bataille (voir notre texte ici). Jusqu’à présent, l’on parlait de quelques personnes, individuellement. Ici, il s’agit d’un groupe d’une importance, telle qu’une réaction officielle des autorités françaises est obligatoire. Voir à ce sujet, mon interview pour RT France hier soir :
Puisque des Français ont bien été blessés et tués, le seul moyen de déterminer les causes et de faire la lumière sur leur mission est d’ouvrir une enquête et c’est au Parquet à le faire. Le mercenariat étant interdit, si des personnes sont convaincues de mercenariat, elles doivent être pénalement punies. A moins de reconnaître que l’Ukraine entraîne une nullification de la législation pénale française.
Par ailleurs, puisqu’il ne s’agit pas d’un cas particulier, mais d’un groupe important, cela veut dire qu’il existe des fillières de recrutement, de formation, un financement, une infrastructure. Ce qui justifie parfaitement l’ouverture d’une enquête parlementaire.
Dans le cas contraire, cela signifierait que ces Français ne sont pas des mercenaires … mais sont bien envoyés, certes discrètement mais officiellement, par l’Etat français pour combattre la Russie en Ukraine. Afin d’éclaircir la situation, le Parlement russe prévoit de s’adresser officiellement aux députés français, comme l’écrit V. Volodine, le président de la Douma :
«Il est important pour nous de savoir s’ils savent que quelqu’un, en violation de la loi, envoie des combattants se battre en Ukraine. Il existe différentes étapes dans l’histoire des relations entre nos pays. Il fut un temps où nos grands-pères et arrière-grands-pères luttaient ensemble contre le fascisme.
Mais aujourd’hui, il s’avère que des mercenaires français meurent pour le régime nazi en Ukraine.
Les citoyens français et les députés représentant leurs intérêts sont-ils au courant de cela ?»
Est-il impossible que la France envoie des Français se battre en Ukraine pour défendre au prix de leur vie l’intérêt globaliste ? Non. Désagréable à accepter. Difficile à reconnaître. Car chacun comprend les conséquences pour notre pays d’une telle politique agressive envers la Russie, d’une telle implication des pouvoirs publics français dans ce conflit.
Par ailleurs, l’envoi de Français participer directement au conflit s’inscrit parfaitement dans la nouvelle ligne, qui se prépare, d’une implication directe des pays européens. Comme nous l’avons écrit, la Grande-Bretagne a signé un Accord de coopération militaire avec l’Ukraine pour une durée de 10 ans, prévoyant une assistance mutuelle (voir notre article ici) en cas d’agression. Or, les pays de l’OTAN affirment que la Russie, justement, agresse l’Ukraine. La France est en train de finaliser un accord de ce type avec l’Ukraine :
«Le chef d’État a également indiqué qu’il se rendrait en Ukraine, en février. En outre, il a assuré que la France était «en train de finaliser un accord» de sécurité avec Kiev du type de celui conclu vendredi entre le Royaume-Uni et l’Ukraine sur dix ans.»
La stratégie atlantiste se transforme petit à petit, face à l’impossibilité de conduire une guerre par procuration, qui soit victorieuse. La base légale d’une implication directe de certains pays se prépare ainsi avec un effet rétroactif, indépendamment de l’entrée formelle de l’Ukraine dans l’OTAN, qui pose trop de difficultés. La Grande-Bretagne et la France semblent à nouveau choisies pour attaquer la Russie et conduire ce front.
Par Karine Bechet-Golovko