Evaluation de l’Occident

Jean-François Geneste analyse pour Russie Politics l’évolution des instruments devant permettre l’évaluation des capacités de résistance et d’action des Etats et la manière dont cet «Occident collectif» modifie les critères en fonction des besoins politiques du moment. Et de ses propres déboires. De la chute du dollar au culte woke, l’on se demande ce que mesurent ces évaluations …

L’Occident collectif, comme l’appelle Vladimir Poutine, s’est doté, au fil des siècles, d’outils d’évaluation de ses adversaires et alliés géopolitiques. Il fut un temps où la mesure comportait plusieurs catégories, mais assez vite, disons depuis la Deuxième Guerre mondiale, un  nombre unique a été retenu, celui du PIB. La Russie a donc été pesée à l’aune de cette seule grandeur, est apparue de la taille de celle de l’Espagne, une bouchée de pain pour un adversaire obèse et qui vaudrait infiniment plus. Ne nous y trompons d’ailleurs pas, puisqu’au premier jour de l’opération militaire spéciale, la décision majeure consista avant tout en des sanctions financières pour mettre « l’ennemi » à genou, merci, Bruno !

Au tour maintenant de l’Ours d’évaluer son adversaire ! Mais, tout d’abord, son économie se porte comme un charme. Son PIB n’a que très peu baissé et va croître en 2023, à moins que ce ne soit déjà arrivé l’année dernière, mais que personne ne veuille le reconnaître. Son positionnement géopolitique et géostratégique, mis à mal après la guerre froide, a repris du poil de la bête et, petit à petit, il commence à ressembler à celui de l’URSS.

Le dollar, qui était hégémonique s’affaiblit à vue d’œil et semble condamné à devenir, au mieux, une monnaie régionale. En tout cas, il ne sera plus ce bâton agité pour dissuader les récalcitrants à ne pas se plier aux desiderata de Washington. Disons que cela sera bouclé avant 2030.

Le délire « woke » poursuit son chemin et bien des états aux cultures traditionnelles sont réticents sinon résistants à la mise en place de lois destructrices socialement.

Au sein même du système, cette « doctrine » crée des dommages incommensurables qui pourraient amener à une guerre civile, aux États-Unis en particulier.

La folie du Covid a largement montré le niveau de corruption de l’Occident ainsi que sa volonté délibérée d’empoisonner la planète en forçant à l’utilisation d’un produit expérimental non testé à très grande échelle sans aucun recul temporel sur ses effets secondaires. Cela aura un coût plus que certain pour son industrie pharmaceutique qui est d’ores et déjà condamnée à péricliter, sans parler de la crédibilité des états et de leurs dirigeants.

Le degré d’industrialisation de l’Ouest est devenu très faible, la destruction des gazoducs Nord Stream ayant sonné le glas de la puissance allemande qui demeurait la seule valeur sûre de ce bloc en la matière.

Les classements scolaires internationaux montrent un grand décrochage du reste du monde par rapport à l’Est, laissant subodorer que l’avenir scientifique, technique, philosophique et littéraire se produira, pour les décennies à venir, en Orient.

La domination américaine repose avant tout sur son complexe militaro-industriel : un budget obèse, des prestations piètres, une efficacité opérationnelle douteuse. Les observateurs initiés pouvaient s’en rendre compte, mais cela crève maintenant les yeux de toutes les populations : des HIMARS qui sont impuissants, des Patriots facilement destructibles et qui ne protègent donc de rien, des Javelin et autre « petits » matériels eux aussi inutiles et la liste est longue. Attendons la livraison des F16 pour que le monde s’éveille à l’impensable avec une aviation même pas obsolète, mais juste à côté de la plaque, sanctionnant un système qui est basé sur l’argent et non sur la performance. Du coup, les majors de l’armement commencent à subir un coup de tempête en bourse compte tenu des mauvais résultats obtenus par leurs produits. N’est-ce qu’un début ou, au contraire, leur cours va-t-il remonter en flèche du fait de budgets en rupture pour rattraper le retard cumulé ? Ce sera en réalité une question d’équilibre entre un déficit  gouvernemental abyssal, une dette insoutenable, le contexte de la dédollarisation et l’impérieuse nécessité de corriger le tir. Ne nous leurrons pas, tous les moyens coercitifs seront bons pour redresser la barre et les alliés seront mis à contribution. Le premier payeur sera la France qui devra sacrifier son industrie d’armement au profit de celle de son maître bien aimé, les Européens, déjà, n’achetant pas ou plus français, et ce dans un monde qui se BRICSise et où l’Occident collectif n’aura plus de prise.

La saisie des avoirs russes a complètement sapé la confiance d’une partie non négligeable du globe dans ce qui était la marque de fabrique des révolutions de la fin de la Renaissance : la propriété privée et son respect. L’empire anglo-saxon et ses satellites se sont donc coupés des investissements étrangers dont ils vivaient grassement jusque-là et surtout, ils ont perdu le caractère de refuge ou d’évasion fiscale pour ceux qui étaient assez riches dans des pays considérés souvent à tort comme autocratiques.

Le Moraliste en chef a, dans ces conditions, gâché sa réputation et cela sera encore consacré par sa défaite inéluctable en Ukraine. Dès lors, sa voix va devenir inaudible autant que son intelligence, récemment, l’était devenue, tant les états qui le constituent ont été affligés de dirigeants intellectuellement indigents, lâches et corrompus. L’effondrement est inévitable, peut-être est-il déjà en cours d’ailleurs quand on voit certaines populations tenant le haut du pavé être déconnectées des réalités physiques. Il ne nous reste plus à savoir si cela se produira « gentiment » comme lors de la chute de l’URSS ou si les sauvages déclencheront un conflit mondial majeur qui serait bien évidemment suicidaire. Dans des pays qui sont en train de légaliser l’euthanasie et la pédophilie, on peut, hélas, s’attendre au pire.

Par Jean-François Geneste, ancien directeur scientifique du groupe EADS/Airbus Group, PDG de WARPA.