Restructuration

Quel que soit le bord politique du lecteur, il ne pourra que convenir que le monde se restructure de fond en comble. Pour Jean-François Geneste, les BRICS prennent de l’importance, les États-Unis, avec l’arrivée de Donald Trump, sont en train de se réformer complètement et il y a, bien entendu, ceux qui vont suivre de plus ou moins loin et de plus ou moins bonne grâce. Nous vous proposons de faire une analyse de ce qui se passe et des conséquences que nous pouvons en tirer.

Commençons par l’oncle Sam avec ses jacksoniens qui viennent de parvenir au pouvoir. Leur priorité semble être la réindustrialisation de leur pays, qui se fait au détriment de l’Europe suite à la destruction des gazoducs Nord Stream et l’imposition de sanctions à la Russie. Cela a créé un transfert massif d’actifs manufacturiers, en particulier à cause d’un coût de l’énergie  moins élevé. Mais ce n’est pas tout ! La mise en place de droits de douane significatifs va faire exploser les mouvements qui se chiffreront in fine et très probablement en plusieurs milliers de milliards de dollars. Ce sera d’autant plus facile que l’Europe vassale réagira mollement aux dispositions américaines. Les grands perdants de cela seront les Allemands qui étaient restés la seule puissance industrielle du continent. L’analyse américaine est bonne dans le sens où ils réalisent ce qui n’est pas encore monté au cerveau des Européens : il y a une différence substantielle entre richesse et argent. Les descendants du May Flower viennent donc de choisir la richesse, laissant à l’Europe un argent qui finira par la reléguer au même rang que l’Espagne et le Portugal le furent après la révolution industrielle alors qu’à la Renaissance, ils avaient les plus importantes possessions d’or au monde.

Mais les États-Unis ont bien d’autres projets ! Ils veulent et insistent sur l’annexion du Panama, du Canada et du Groenland. Pour le premier, la Chine a mis un coup d’arrêt net à un règlement « pacifique ». Attendons de voir ce qu’il adviendra. Concernant le deuxième, qui reste une dépendance de la Grande-Bretagne, la nomination de Mark Carney, ancien gouverneur de la banque d’Angleterre, montre une certaine volonté de résistance, mais gageons qu’Albion capitulera. Cela fait longtemps que l’empire sur lequel le soleil ne se couchait pas a renoncé à la géographie physique au profit de la finance qui, chacun peut s’en rendre compte quotidiennement, n’est qu’une gigantesque bulle infestée de tricherie et de voleurs. Nous voyons donc renaître, avec Trump, une tendance historique à l’extension territoriale de certaines civilisations. Le Groenland, quoi qu’en dise son Premier ministre, n’a guère de chance de s’opposer à quoi que ce soit si Washington décide de l’envahir, mais cette situation est intéressante à plus d’un titre. En effet, la charte de l’ONU comporte un article destiné au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, celui qui a été invoqué par la Russie pour déclencher l’opération militaire spéciale en Ukraine en 2022. Ce ne furent alors que cris d’orfraie ! Nous attendons avec impatience l’annexion du Groenland et les hurlements qui l’accompagneront. Un ministre des finances français devrait dire que nous allons mener une guerre impitoyable contre les États-Unis et mettre leur économie à genoux, nous devrions être témoins de l’envoi d’armes invraisemblables aux combattants groenlandais et pourquoi pas, même, ne pourrait-on leur offrir la couverture nucléaire française ? Qu’adviendra-t-il ? Rien de tout cela ! Comme l’a dit Poutine, quand l’oncle Sam sifflera, le « dogue » européen se mettra au pied  de son maître et remuera la queue. Pourquoi ? Simplement parce que la classe politique européenne, depuis bien trop longtemps, est corrompue à un point que les populations n’imaginent pas. Et cela commença dès le départ, avec un Monnet et un Schuman qui étaient des agents de la CIA rémunérés sur des comptes à la Barclays Bank à New York, un Walter Halstein, premier président de la Commission européenne, qui était un ancien nazi notoire et avait été placé là par Washington et nous passerons sur les sordides détails actuels dont vous pourrez avoir une idée dans cette vidéo.

Il est temps dans ce texte de faire une pause pour parler d’Europe, ce que nous avons entrepris de faire et pour la comparer aux Américains. Notre continent est caractérisé par une corruption incroyable, avec un enrichissement personnel des politiciens qui singularise les régimes dévoyés. La dérive dictatoriale qui s’installe, de nature politique en interdisant les opposants (Roumanie, France et en connexité Moldavie et Géorgie) sans parler du soutien inconditionnel à un mouvement néonazi en Ukraine, se décline aussi dans le contrôle des populations et des moyens d’information avec une liberté de parole qui est bafouée. Cette société se caractérise par l’enrichissement d’une caste dirigeante qui n’a de cesse de paupériser la plèbe via divers stratagèmes qui, bien qu’efficaces pour les détournements en tous genres, affaiblissent in fine considérablement les États qui sont objectivement en voie de disparition. Le recours des « élites » à une fédéralisation leur donne l’impression qu’elles vont échapper à la catastrophe par une fuite en avant, mais la dévastation est telle que l’effondrement y est inéluctable et à très court terme. Rappelons-nous ici que certains peuples font nation. La France en est le meilleur exemple. Mais, l’histoire l’a prouvé, elle ne peut le faire avec ses voisins, sinon cela se saurait depuis au moins 1500 ans. Il s’agit donc bien d’un système artificiel qui a été créé et pensé depuis l’extérieur et a été instillé pour affaiblir, le cas échéant détruire.

Revenons aux États-Unis avec la nouvelle lubie d’Elon Musk qui, excusez du peu, veut annexer la planète Mars ! Contrairement à l’article qui est mis en lien, nous n’allons pas critiquer la démarche d’une personne originale. Les États-Unis se sont formés par annexion de territoire (au passage on condamnera fermement le génocide des Indiens qui en a résulté) et ont pris leur indépendance du Royaume-Uni par la suite. Aller sur Mars et réclamer une sécession de la terre, à terme, comme l’a dit par le passé l’homme d’affaires n’a rien que de très logique. Mais si la conquête de la planète rouge se concrétise, il sera alors intéressant d’observer les réactions internationales. En effet, cela violerait le traité sur l’espace de 1967. Néanmoins, depuis leur existence (environ 240 ans avec seulement 16 ans de paix dans cette période) combien de fois les Yankees ont-ils dénoncé les pactes qu’ils avaient signés ? Vos deux mains seront loin d’y suffire pour les compter. C’est une de leurs constantes ! Et quand on nous dit, en France par exemple, que nous sommes contraints par un accord, rappelons ici au lecteur que c’est « de la servitude volontaire ». Rien n’empêche de déchirer un quelconque bout de papier et de ne plus l’appliquer, y compris du jour au lendemain, comme ce qui concerne les traités européens et sans passer par l’article 50 pour sortir de cette ornière.

Mais là n’est pas notre propos principal. Ce que montre cette soif d’extension, ce panaméricanisme, c’est le ressort d’un peuple encore jeune et qui rêve de conquêtes. Là où l’Europe se retire, comme la mer à marée basse, de partout, et, notamment, pour la France, d’Afrique où elle n’a pas su apporter grand-chose ces dernières décennies, les États-Unis, eux, visent à s’étendre. Qui peut penser un instant que, si la technologie est au rendez-vous, la colonisation de la planète Mars n’attisera pas des appétits ? Et n’est-ce pas légitime que de vouloir occuper une nouvelle terre ? Les Américains ont été les premiers à envisager d’exploiter la ceinture d’astéroïdes qui se situe entre Mars et Jupiter. Ils en ont même fait une excellente série télévisée intitulée « The Expanse ». Pendant que la caravane passe, donc, les chiens aboient en hurlant au scandale et à la violation des traités. Rappelons, à toutes fins utiles, qu’il est légal de ne plus adhérer à un traité, quel qu’il soit ! Il suffit d’en avertir la partie adverse.

Nous avons ainsi un peuple conquérant et en quête d’avenir, face à une civilisation (on ne peut plus parler de  peuple dans ce cas) mourante ! L’Europe, empêtrée dans sa corruption scandaleuse et sa vacuité à quasiment tous les niveaux, est en phase terminale. Le cancer qui la ronge comporte bien des responsables dont la liste des noms ici est bien trop longue à énumérer.

Alors, amusons-nous un peu pour pointer du doigt quelques perles instructives. Revenons aux droits de douane mis en place par Washington. Remarquons tout d’abord que tout est taxé sauf… Les capitaux ! Ils ne sont imposés ni à leur entrée aux USA ni à leur sortie d’Europe ! Notons aussi que tous les pays du monde, à part la Russie, ont été touchés. Or, les États-Unis ont 340 millions d’habitants contre 8 milliards sur la planète. Que pourraient-ils faire contre une coalition globale de plus de 7,5 milliards ? Rien ! Et pourquoi nos élites dispendieuses et corrompues qui ne manquent jamais une occasion de nous rajouter une petite louche de mondialisation ne proposent-elles pas une alliance universelle contre Washington ? Un pas moins téméraire pourrait consister en une demande d’adhésion immédiate aux BRICS et à se concerter dès maintenant pour réagir au plus vite. Il ne fait nul doute que la Chine verrait cela d’un bon œil. Mais rassurez-vous, rien de tel n’arrivera. Les traîtres sont au pouvoir ici et seul un effondrement total aura une chance de nous en débarrasser.

Nous allons terminer ce texte en évoquant le reste du monde ; plus exactement, nous nous cantonnerons à la Russie et la Chine, qui constituent le top 3 avec les États-Unis. Commençons par la première, qui a 17 millions de kilomètres carrés pour 150 millions d’habitants. Cette trop faible densité ne peut lui permettre d’envisager quelque politique expansionniste que ce soit. Elle a par ailleurs un territoire très peu exploité et n’a pas  besoin d’une croissance externe. Toutefois, les Russes veulent consolider leur positionnement géopolitique et ont donc décidé d’investir dans une relation privilégiée avec les pays d’Afrique. Ils y entrent en profitant de l’incurie française, au Sahel en particulier, un indice, s’il en fallait, de la baisse abyssale du niveau intellectuel de nos dirigeants et de leur corruption. Sans doute que cela conduira à des frictions sévères avec Washington dans un futur proche. Idem pour le Moyen-Orient, où, en même temps, la Chine et la Russie ont coconstruit des liens forts et économiques avec l’Iran. Il est très cocasse de constater aujourd’hui la menace qui pèse sur l’ancienne Perse via Donald Trump, alors que c’est lui qui a unilatéralement rompu le JCPOA durant son premier mandat. Cela témoigne soit d’un manque de logique, soit d’une mauvaise foi voire une malhonnêteté patente, soit des deux à la fois. Poutine vient d’avertir Trump qu’il ne laissera pas bombarder l’Iran sans répliquer. Gageons que la Chine est dans une disposition similaire, puisque l’État des ayatollahs est le premier fournisseur en hydrocarbures de l’empire du milieu. En conséquence, la Russie, sans s’étendre physiquement, mais en plaidant la multipolarité, agrandit son influence sur terre et sécurise ce que d’aucuns auraient appelé, en d’autres temps, son étranger proche, lequel est de plus en plus éloigné, mais ne sommes-nous pas dans le fameux village planétaire aujourd’hui ? Néanmoins, à notre connaissance, elle n’a aucun plan d’invasion de l’espace et n’en a probablement pas les moyens non plus.

Cela nous permet de passer à la Chine. C’est une civilisation en tous points différente et sa manière d’agir l’est aussi. Sa façon de prendre position se fait par la voie du commerce après qu’elle ait construit, depuis 1971, quand Richard Nixon alla la chercher pour lutter contre l’Union soviétique, l’atelier du monde dans lequel elle maîtrise la quasi-totalité des technologies, y compris celles dites de pointe. Dès lors, avec des coûts très bas, elle est devenue le fournisseur en biens matériels de toute la planète, ce qui la rend indispensable à toute l’humanité. Sa faiblesse est agricole, mais un plan de fertilisation de ses déserts est en cours et il ne fait nul doute qu’à terme, elle la compensera, ce qui lui permettra une extension territoriale via ses populations qui restent très concentrées, bien au-delà de ce qu’auraient pu prévoir à l’origine les démographes. Pour le reste, elle ne cherche pas à s’agrandir. En revanche, par le commerce, elle augmente sans cesse son influence et, d’une certaine façon, elle a un projet d’élargissement physique au travers de la BRI ou route de la soie, par des infrastructures qu’elle contrôle, même si elles ne sont pas sur son sol. Dans le domaine spatial, elle est extrêmement active et le seul rival, de fait, des États-Unis, avec plusieurs desseins de constellations de type Starlink. Elle a aussi sa propre station spatiale et il ne fait nul doute qu’elle s’opposera à la colonisation de Mars par les seuls Américains. Très sûrement aura-t-elle des projets concurrents efficaces qui lui permettront de contrebalancer les ardeurs de l’oncle Sam. Et peut-être verra-t-on bientôt, qui sait, le premier traité de paix américano-chinois concernant Mars ? Les autres regarderont cela à la télévision à défaut d’en être acteurs.

Quelle conclusion tirer de tout cela ? D’un côté des protagonistes vivants, États-Unis, Chine, Russie, de l’autre, un lieu à la dérive intellectuelle et morale, l’Europe ! Une continuation de l’histoire pour les premiers, une sortie pour la dernière avec des peuples qui ne songent même plus à se reproduire et à conserver les fondements de leur passé. Ainsi s’écrit le clap de fin pour une civilisation dont le souvenir s’efface déjà. Comme le disait Donald Trump dans sa célèbre émission télévisée « the apprentice » : you’re fired!

Par Jean-François Geneste, ancien directeur scientifique du groupe EADS/Airbus Group, PDG de WARPA.